4éme congrès international du féminisme islamique.

J’intitulerais volontiers cette 4éme rencontre : « MUSLIM PRIDE ». Je ne sais où j’ai lu ou entendu cette expression lors du congrès, en tout cas elle résume parfaitement mon sentiment après ces 4 jours passés dans la capitale espagnole, avec cette année, plus de cinq cent participantes et participants (en effet, un plus grand nombre d’hommes étaient présents que lors des trois autres rencontres), autour  de thèmes ayant tous à voir avec la saisie des textes et de la ré-interprétation du Coran et de la Sharia dans une vision égalitaire.

Elle était organisée sous le patronage et avec le soutien financier du ministère espagnol des affaires étrangères et de la coopération, des instituts culturels Casa Asia et Casa Arabe et le ministère de l’égalité avant sa suppression lors du remaniement du gouvernement espagnol, la semaine précédent la rencontre.

Au cours des 20 dernières années, la même phrase commençait en général les articles, reportages, interviews ou ouvrages sur la question du féminisme et de l’islam. Cette phrase revenant comme une rengaine dont la répétition tenait lieu et place de démonstration, était la suivante : il y a là une contradiction IMPENSABLE dont l’existence est donc IMPOSSIBLE. La rencontre de Madrid est venue confirmer avec encore plus de force, d’énergie et d’éclat que l’impossible creuse le sillon patient, courageux et déterminé du possible en acte, qui non seulement ébranle mais infirme les fausses évidences de refrains bien connus d’une paresse de la pensée.

Outre un public plus nombreux et un peu plus masculin, parmi les conférencières de cette année, nous avons eu la joie de rencontrer l’une des fondatrices de ce mouvement féministe islamique, l’iranienne Ziba Mir Husseini qui nous en retraça l’histoire depuis les années 1990 en Iran. Elle nous le présenta comme l’enfant non désiré de l’islamisme politique qui, en politisant la différence des sexes et les droits des femmes, a provoqué une réaction, non seulement en Iran, mais aussi en Malaisie avec la construction d’un réseau international, MUSSAWAH (égalité), O.N.G. qui regroupe une cinquantaine de pays. Elle nous transmit son savoir et son expérience d’anthropologue avec une telle force de conviction tranquille, dirais-je, que nous sentîmes que nous vivions un tournant historique important qu’elle conclût par ces mots, au cours d’un des débats sur féminisme  islamiste, islamique, musulman : « Nous sommes là, et notre présence ici témoigne que nous avons gagné. ».

C’est d’Afrique du Sud,  avec la présence d’une autre conférencière, Sa’diyya Shaikh, qu’un autre nouveau pas fut franchi avec, pour la première fois, une intervention sur féminisme et soufisme avec une approche féministe d’Ibn Arabi. C’est elle également qui dirigea la prière du vendredi et prononça une khotba dans le droit fil de ce lien qu’elle développa dans sa conférence entre spiritualité et action sociale d’un point de vue de l’égalité de genre. Avec érudition, clarté, passion et humour, elle présenta certains aspects de la métaphysique d’Ibn Arabi qui, d’ordinaire, fait l’objet d’études fort savantes sur le soufisme, mais jamais reliée à des positions juridiques de ce penseur sur l’égalité de genre. Oui, le féminisme islamique produit de la connaissance, comme le dit Ziba Mir Husseini.

En ouverture de la conférence, Laura Rodriguez Quiroga, présidente des femmes musulmanes d’Espagne et co-organisatrice du congrès, avait présenté une étude qui était une analyse de contenus des divers moyens de communication sur les femmes musulmanes assez significative de l’influence qu’ils avaient sur la construction de l’imaginaire collectif sur elles. Il en ressortait une image 100% négative de femmes victimes et  d’hommes victimaires avec une obsession massive portée sur le vêtement, le reste portant sur la lapidation, les mutilations génitales, la prohibition de la mosquée et un tout petit 2% sur le féminisme islamique.

En conclusion de cette même conférence, Ndeye Andujar, organisatrice de la rencontre et membre de Junta Islamica catalane nous a présenté ce dont on ne parle jamais dans ces mêmes moyens de communications, à savoir les actions des différents réseaux internationaux, européens et nationaux qui existent et oeuvrent à divers niveaux pour la justice de genre, avec, entr’autres, ces campagnes internationales d’un million de signatures sur le thème des mosquées justement ou de la lapidation. Elle conclut son exposé par ces mots : « le féminisme islamique porte le futur du féminisme ». Peut-être pourrait-on entendre cette phrase dans le sens de ce que Houria Bouteldja du parti des Indigènes de la République a développé dans son intervention en parlant du féminisme « dé-colonial », qui participe d’un féminisme universalisant.

Ces trois jours d’échanges intenses dans les différents niveaux de connaissances et de pratiques entre spiritualité et luttes sociales, furent, pour celles qui avaient participé aux trois rencontres précédentes à Barcelone, un pas en avant dans la confiance en soi, comme si, peu à peu, le féminisme islamique quittait  le banc des accusées sans arrêt mises en demeure de prouver ou justifier qu’elles n’étaient ni manipulées par l’extérieur, ni aliénées de l’intérieur….. ….et écrivait avec une tranquille assurance l’histoire im-possible, im-pensable de la révolution féministe, la tête haute. Muslim Pride.

 

5 commentaires

  1. Assalamou aalaykoum,
    Nul doute que l\’Islam est féministe, il a accordé aux femmes des droits que les autres sociétés, notamment occidentales, n\’ont octroyé qu\’au cours du 20ème siècle.
    L\’Islam respecte la femme, lui offre une place de choix.
    Mais doit-on se réjouir de voir une femme conduire la prière du Vendredi et prononcer la khotba, contredisant ainsi la tradition prophétique ?
    La défense des droits de la femme musulmane, plus souvent discriminée, ne doit pas conduire à un excès d\’égalitarisme.
    L\’égalité en droit entre les sexes, oui mais dans le respect de la singularité des deux sexes.

  2. Salam alaykoum,

    Tout à fait d\’accord avec le commentaire précédent, l\’émancipation féminine ne peut se faire que dans le cadre des lois de Dieu et de la tradition prophétique, le reste n\’est qu\’\”illusion de feminisme\”
    Wa salam

  3. ASSALAM,
    Tout à fait d\’accord avec vous.Mais cette égalité s\’est perdue au fil des époques,troquée par des coutumes machistes, certes nous n\’avons rien à craindre de Dieu mais des hommes je n\’en suis pas si sure . Si nous voulons les reconquerir,c\’est à nous de réagir.Cette mission ne peut être relever que par des femmes pour les femmes . Dire qu\’aujourd\’hui nous avons des droits que les occidentaux n\’ont aquis qu\’hier s\’est se voiler la face.

  4. Mer et terre;

    On a craindre de Dieu si on remonte hommes et femmes les uns contre les autres.

    …Cette mission devrait être relevée par des femmes pour le monde je le souhaite car la solution ne peut être unilatérale dans ce genre de cas.

    Pour le reste je suis OK.

  5. Concernant l’imamat de la femme, certes la femme peut faire l’imam mais seulement dans un groupe constitué de femmes ou d’enfants en bas age. Dans un jama’a de base composé de femmes et d’hommes, l’imam est obligatoirement un homme tout le monde le sait. C’est ça la tradition prophétique

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