Le Coran, un ami intime ici-bas et dans la vie dernière

Je m’appelle Farid, je suis né en France, âgé de 44 ans, marié, père de 3 grands enfants (20 ans, 18 ans et 14 ans), je suis préparateur en pharmacie.

J’ai caressé le rêve d’apprendre entièrement le Coran il y a de nombreuses années, dans la compagnie pieuse de mes frères et sœurs, sous le regard bienveillant de l’homme au grand cœur Abdessalam Yassine (puisse Dieu lui accorder Sa miséricorde et les plus hauts degrés) qui n’a eu de cesse de m’encourager dans cette direction. Pourtant je me débattais avec l’apprentissage et me décourageais rapidement. Toutes ces années passées j’ai réussi à apprendre les 10 derniers hizbs du Coran et les sourates Baqara et une partie de La Famille d’Imran. Puis ce fut la mise en hibernation de cette volonté d’apprendre. A chaque fois qu’une petite flamme de volonté s’allumait elle était vite étouffée par le premier prétexte qui s’offrait à moi : je dois d’abord maîtriser ce que j’ai appris et à peine la tête tournée vers un hizb que le hizb précédent devenait chancelant. Je me décourageais vite…

Si je m’attarde sur cette partie c’est que certainement beaucoup se retrouvent dans ce schéma. Et que ce schéma n’est pas une fatalité puisque j’ai pu me sortir de ce tourbillon et que je n’ai absolument rien d’extraordinaire.

Et oui souvent on se dit qu’untel (ou unetelle) a appris tout le Coran parce qu’il est différent de moi, il a l’arabe ou il a appris petit ou encore il n’a pas mes soucis de famille, il a une excellente mémoire etc, ce qui semble nous affranchir de cet apprentissage.

Entrons donc dans le vif du sujet.

Un pacte avec Dieu

Je remercie Dieu d’avoir fait naître ce désir ardent d’apprendre le Coran cet été 2020. Le COVID a ralenti brusquement la marche du monde et j’étais isolé chez moi. Rencontrer ses frères et sœurs en Dieu n’était plus possible et, comme l’homme jeté en prison, j’étais face à mon ego sans aucune agitation extérieure pour me trouver un prétexte à retomber dans ma paresse. Ce jour-là je me suis tourné vers Dieu et on a pactisé, je ferai tous mes efforts pour y arriver et Il me soutiendrait en retour. Ce pacte, par la grâce de Dieu je ne l’ai pas bafoué. Malgré les difficultés, car il ne faut pas se mentir tout n’est pas rose, le brouhaha assourdissant de la vie refait surface sans cesse, et nous sommes bien obligés d’y prendre part, j’ai tout fait pour honorer cet engagement avec Dieu.

J’ai eu la chance de suivre quelques années d’études au sein d’un institut de sciences islamiques avant cet été, et l’approche des différentes sciences religieuses m’ont fait prendre conscience que tout découlait du Coran. J’avais l’impression que je tournais autour du pot par mon manque d’investissement dans son apprentissage, et telle la personne à qui on montre des images et des vidéos d’une eau pure ma soif ne cessait de grandir sans être étanchée.

J’avais en main tous les moyens pour réussir :

–        J’avais une méthode d’apprentissage qui s’adaptait parfaitement à mon profil,

–        Je me suis inscrit à une école du Coran

–        J’avais un professeur extraordinaire et très disponible

–        Ma famille m’a beaucoup aidé.

J’apprenais chaque semaine 4 pages du Coran et je révisais 5 pages de mon ancien apprentissage que je restituais à mon maître du Coran chaque samedi ou dimanche (car je travaillais un samedi sur deux) en physique ou par téléphone. J’essayais toujours de finir mon nouvel apprentissage le mardi pour pouvoir le réviser jusqu’au jour de la restitution, car le stress me faisait perdre pas mal mes moyens. Du coup j’anticipais l’apprentissage de la semaine suivante pour pouvoir tenir l’échéance du mardi ; en effet j’étais incapable d’apprendre plus d’une page dans la journée sans perdre en qualité. La machine était huilée au bout de 3 semaines et durant 2 années j’ai pu garder le rythme sans rien ne diminuer ni augmenter quelles qu’en furent les tentations. Je ne regardais pas ce que les autres faisaient et je n’écoutais pas les discours qui risquaient de me décourager. J’avais mon objectif bien en face de moi et seul mon maître du Coran comme guide dans cet océan. J’étais comme cette personne qui fait du vélo sur un sentier très étroit sur le sommet d’une montagne, si je m’arrête je tombe et je risque de ne jamais me relever. J’avais la rage d’y arriver chaque semaine, et je détestais ma petite voix qui me demandait de se reposer. Il fallait que je garde le dessus.

Un jour j’ai eu une crise d’appendicite, j’ai passé deux jours à l’hôpital ; à peine sorti de mon anesthésie générale, je sortis mon Coran et je regardai le temps que j’avais perdu : j’étais sur mon lit et je pleurais tout en révisant de peur de manquer mon rendez-vous, je m’interdisais de donner à mon maître une quelconque excuse bien que mes récitations n’aient pas été toujours fluides, j’étais dans mon premier apprentissage et je ne voulais rien lâcher.

Comme je l’ai dit, durant mon apprentissage j’étais fixé sur ma copie et je ne m’intéressais pas à celui qui avançait plus vite ou moins vite pour ne pas me décourager ou ne pas me sentir plus fort, je voulais juste être pendant cet apprentissage.

Être avec le Coran 

Je voulais beaucoup plus insister sur la détermination que Dieu a mis dans mon cœur car c’est elle qui nous amène jusqu’au bout de cette première grande étape. Insister sur tous les bienfaits du Coran et sur le mérite de l’apprendre ne suffisent pas toujours, comme le papier qu’on utilise pour lancer un feu de camp. Après il faut des bûches. L’istiqama (1) pour rester droit dans nos résolutions.

Maintenant, et pour celles et ceux qui ont traversé le chapitre de ma vie qui décrivait la réalité apparente de mon apprentissage, je souhaite partager le bonheur et la nature exceptionnelle d’être avec le Coran.

Si la difficulté fait partie de ce chemin, la saveur et le bonheur qui te transportent dans les jardins du Coran comblent largement les maigres efforts consentis pour y arriver. Deux journées d’apprentissage ne se ressemblent pas tout comme deux pages du Coran ne se ressemblent pas. Combien de fois j’apprenais une page et au bout de 3 ou 4 lectures de ma page (2) quand je retenais un verset il m’apparaissait sous un autre jour comme si je ne l’avais jamais lu, mes yeux se brouillaient et le verset ne cessait de m’habiter tout au long de la journée et parfois la nuit où je faisais des rêves où ce verset intervenait. C’est dire comment le Coran envahit tout ton être et agit dans des contrées de ton âme que tu ne soupçonnais pas. D’ailleurs, j’ai écrit plusieurs articles durant ces deux années d’apprentissage à partir de ces versets que j’ai partagés sur ce site. En effet, plus je méditais et plus ces versets me nourrissaient, sans jamais pouvoir épuiser leurs ressources…

Donc chaque jour était parfumé différemment, je ne me sentais jamais en manque de spiritualité, en manque de volonté, en manque d’amour, j’étais toujours dans les bras du Coran, mon ami intime. Et le premier sentiment que j’ai eu lorsque j’ai fait ma première clôture c’est le bonheur de me savoir en compagnie du Coran dans ma tombe. Ce compagnon abstrait dans cette vie qui revêtira une forme concrète et te tiendra compagnie pour toujours…

Ils m’ont aidé

Il y a des jours où rien ne rentrait dans ma tête, encore moins dans mon cœur. L’esprit dispersé, les péchés insoupçonnés, l’insouciance, la colère, tous ces sentiments se mettent en travers du Coran. Quand ces jours arrivaient j’utilisais mon grand joker : j’appelais yema (ma maman chérie) et je lui disais que j’étais bloqué, alors elle envoyait une invocation aussi grande qu’une montagne et personne n’osait se mettre entre cette invocation et Dieu. Et immédiatement le vélo reprenait son rythme de croisière, elle a bien mérité sa couronne de lumière. Parfois, le blocage était très profond, je me tournais alors vers Dieu et je lui exprimais mon besoin et mon incapacité à le combler. D’autres fois, j’approchais le Coran avec beaucoup de difficultés au point d’éprouver un sentiment de recul vis-à-vis de la page que j’apprenais, et je me remettais tout de suite en question, je manquais de politesse et d’éducation vis-à-vis de ce compagnon sans m’en rendre compte et en renouvelant mon intention les versets qui me faisaient peur et donc me paraissaient difficiles devenaient un jardin agréable où j’appréciais de m’y reposer. Certes, dans ces moments-là je m’aidais des traductions, des interprétations ainsi je pouvais mieux méditer.

Je n’oublie pas mon maître, lui-même élève d’un grand cheikh, qui m’ont accordé leur pleine confiance, qui m’ont corrigé en douceur et n’ont jamais abîmé cette volonté qui m’animait. Mon cher professeur a gardé sa porte grande ouverte pour moi, chaque dimanche pendant les vacances alors que l’institut fermait ses portes. Il a toujours renvoyé la balle, cette balle qui chaque semaine se retrouvait dans mon camp, et que je ne pouvais pas ne pas renvoyer, je ne m’en donnais pas le droit.

Enfin, je remercie de tout cœur ma famille, mes enfants qui ont supporté mes nombreuses récitations à haute voix, car comme l’haleine du jeûneur qui est telle un parfum auprès de Dieu, les voix n’ont pas toujours les timbres qu’il faut pour caresser les tympans des créatures. J’exprime aussi ma profonde reconnaissance à ma douce Houria qui partage ma vie depuis tant d’années et qui a les yeux qui brillent quand elle me voit réussir, un océan d’amour et un havre de paix pour moi. Ma voix n’est pas seule à faire résonner les murs de ma maison, et je demande à Dieu qu’Il accompagne ma petite Mayssem (majeure mais quand même ma petite) qui est bien partie pour arriver au bout de sa clôture, vivement son témoignage sur ce site) ainsi que Younes qui, du haut de ses 14 ans, s’efforce dans les allées du Coran ; puisse Dieu accorder à toutes les bonnes résolutions de la communauté du Prophète (paix sur lui) de grandir et de faire place à un magnifique arbre dont la forêt prochaine ne pourra plus être ignorée par l’humanité…

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(1)    L’istiqama consiste à une certaine droiture intérieure et une rectitude globale de l’être

(2)    J’utilise la méthode d’apprentissage globale durant laquelle je lis plusieurs fois la page avec le verset de la page suivante pour faciliter l’enchaînement de deux pages. Et lorsque je relis ma page j’essaie de retenir le début puis je continue à lire la suite et ainsi de suite jusqu’à retenir l’ensemble de la page en un bloc. Alors je m’enregistre pour nettoyer les erreurs qui se seraient glissées et enfin je répète la page 10 fois

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