L’Hégire, source de renouveau

L’objectif de cet article est d’extraire quelques enseignements de l’événement de l’Hégire afin de mieux percevoir et comprendre notre contexte spatio-temporel et notre action dans ce contexte. Pour un récit historique plus complet se reporter à une biographie de référence tel que « L’ultime joyau ».

L’homme éprouvé

Ici, l’homme en question est le Prophète Muhammad, paix et salut sur lui, l’ultime joyau, source de grâce et de guidance, et astre lumineux.

L’épreuve est qu’au bout de treize années de persécutions vécues dans la plus exemplaire et plus belle des patiences, le Prophète fut contraint de quitter son peuple et sa terre natale en compagnie d’un petit groupe de fidèles. Tous se dirigeaient vers une destination inconnue et, pour la plupart vers un avenir incertain, mais tous restaient confiants et apaisés.

Cette exode fut extrêmement périlleuse, notamment, pour l’Envoyé de Dieu. En effet, sa tribu conspirait déjà sur son assassinat mais Dieu en a voulu autrement. Les épreuves ont souvent un aspect subtil et imperceptible auprès des esprits rationalistes. En effet, elles donnent fréquemment lieu à des acquis importants. Ainsi, l’exode a permis au Prophète, paix et salut sur lui, et à ses compagnons de fonder la première communauté musulmane à Médine qui reste à jamais un modèle car “lié par l’amour en Dieu et imprégné de l’amour de Dieu et de Son Messager”.

Pour l’amour de Dieu

Ces hommes et ces femmes ont renoncé à ce qu’ils avaient de plus cher, à savoir, famille et fortune à l’image de Sohayb le romain et la pieuse Oum Salama. Cet amour consistait en un attachement tout particulier au Prophète, paix et salut sur lui, et s’exprimait par un dévouement unique et exemplaire dont voici trois récits :

D’abord le très jeune et courageux compagnon Ali qui, au soir de l’exécution du complot contre le Prophète, a passé la nuit dans son lit au risque d’y laisser sa vie. L’amour de Dieu et de Son Messager a développé en lui la vertu du courage et a dissipé toutes les peurs.

Le deuxième exemple est Abu Bakr “le véridique” qui, selon un Hadith rapporté par sa fille Aïcha, versa des larmes de joie lorsque le Prophète, paix et salut sur lui, lui annonça qu’il sera son compagnon pour l’Exode. Tout au long du trajet, et par souci de protéger le Prophète d’éventuelles agressions ou dangers, Abu bakr se mettait tantôt devant, tantôt derrière, tantôt à droite et tantôt à gauche.

Être joyeux dans la difficulté est possible lorsque le cœur déborde d’amour et qu’on a la chance d’être en compagnie d’un homme d’une spiritualité exceptionnelle. Chose encore possible de nos jours pour celui qui s’en soucie. Les gages de la sincérité se prouvent et se découvrent au cœur de l’épreuve en étant avec des gens sincères.

Et enfin, l’exemple d’Asma fille d’Abu bakr qui, enceinte de plusieurs mois, s’est vue confiée la tâche d’apporter les vivres durant trois jours au Prophète, paix et salut sur lui, et à son père qui se cachaient tous deux dans la grotte de Thawr. Ce choix prophétique se révéla judicieux car d’aucuns les Quraychites ne pouvaient soupçonner qu’une jeune femme dans sa situation puisse gravir une aussi haute montagne. Une femme imprégnée par l’amour suprême, même vulnérable et vivant des moments fragiles de son existence, peut jouer un rôle magistral dans les plus grands projets de son époque et être la nourrisse de toute une société au sens propre comme au sens figuré. Grâce à la spiritualité qu’ils recevaient ensemble du Messager de Dieu, paix et salut sur lui, hommes et femmes, ensemble, ont participé à construire la nouvelle société.

Contre le repli communautaire

Dans ce projet d’Exode un non-musulman a joué un rôle majeur souvent minimisé dans la plupart des ouvrages qui traitent cette question. Parce que cet homme était digne de confiance, l’Envoyé de Dieu, paix et salut sur lui, lui a confié la mission de le guider dans le désert qui sépare la Mecque de Médine et de les aider à déjouer les plans des Quraychites. L’ouverture sur l’autre et sur le monde, voilà deux qualités prophétiques qui font souvent défaut à la communauté musulmane. En France, il y a des hommes et des femmes intègres ne faisant pas partie de la communauté spirituelle mais qui peuvent être des partenaires qui partagent notre combat pour la liberté, l’égalité et la fraternité humaine.

Aimer sa patrie

En s’éloignant de la Mecque le Prophète, paix et salut sur lui, se retourna vers elle et pleura … son déchirement. Elle n’était pas seulement sa terre natale mais surtout une mère qui la vu grandir et le lieu où il a construit un passé et une mémoire. Durant sa jeunesse, il a activement participé aux projets de sa Cité, notamment, la reconstruction de la Ka’aba et le pacte d’alfodoul qui représentait une charte d’alliance contre toutes les injustices qui pouvaient atteindre les visiteurs sans défense de la Mecque.

Malgré ses qualités, lorsque le Message divin lui fut révélé, son peuple lui a livré un combat sans merci qui alla jusqu’au boycott socio-économique alors que son Message, unique et nouveau, appelait à la justice et à l’amour. Cette hostilité démesurée et la profanation de la Kaaba par les rituels d’idolâtrie n’empêchèrent point le Prophète, paix et salut sur lui, d’aimer sa terre et son peuple. Si actuellement les français de confession musulmane sont cibles d’injustices alors le changement par l’engagement associatif, social, culturel et politique peut toujours s’opérer. Il revient aux musulmans d’acquérir, grâce à l’éducation spirituelle de chacun, la discipline nécessaire afin de surmonter l’émotivité nuisible qui empêche le travail serein et constructif.

Aimer sa patrie, oui, car sans cela on ne peut passer le Message prophétique d’amour et de miséricorde.

Notre Hégire doit être un mouvement spirituel, comportemental, social et culturel qui touche tous les aspects de l’être humain. Ce mouvement consiste à bouger de l’insouciance et l’oubli vers le souci de Dieu, de la vie dernière et de la condition humaine ; de la paresse et la réactivité vers l’action réfléchie et méthodique ; de l’individualisme et l’égocentrisme vers l’amour d’autrui ; du mimétisme culturel vers la création et à l’innovation.

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