Génocide à Gaza, contrôle de l’eau : en Jordanie, la colère monte contre Israël

Le contrôle israélien du Jourdain et le non respect des accords régionaux sur l’exploitation des eaux privent les Jordaniens d’un accès à l’eau potable. En plein génocide d’Israël à Gaza, des dizaines milliers de Jordaniens ont manifesté leur colère.

En Jordanie, toutes les colères du peuple convergent vers une seule cause : Israël. Le génocide barbare auquel se livre les forces armées israéliennes soutenues par les Etats-Unis dans la plus grande impunité internationale a plongé le peuple jordanien dans une colère noire. A cela s’ajoute une autre raison : le contrôle israélien des eaux du Jourdain.

D’après la revue en ligne Reporterre, « la Jordanie est l’un des pays les plus pauvres en eau au monde, avec une moyenne de 70 litres par personne et par jour, loin des quasi 150 litres en France. » Un accord de paix signé sous pression américaine entre la Jordanie et Israël en 1994 avait comme clause la fourniture d’un volume annuel d’eau situé entre 25 et 50 millions de m³ (MCM) au royaume hachémite.

Tensions entre Amman et Tel Aviv

Un accord signé le mois dernier prévoyait même l’échange de l’eau potable du Jourdain contre de l’électricité jordanienne « afin d’augmenter les réserves d’eau du pays frappé par la désertification« . Mais en plein génocide des palestiniens, le ministre jordanien des Affaires étrangères Ayman Safadi a claqué la porte des négociations, le 16 novembre. « Pouvez-vous imaginer un ministre jordanien assis à côté d’un ministre israélien pour signer un accord sur l’eau et l’électricité, alors qu’Israël continue de tuer des enfants à Gaza ? » a-t-il commenté.

L’eau n’était pas le seul objet de l’accord. Du gaz naturel devait être acheté aux Israéliens dans le cadre d’un accord secret. Mais les Jordaniens contestent aujourd’hui les accords et la normalisation de la Jordanie avec l’Etat hébreu. « La paix entre Israël et la Jordanie échoue parce qu’elle n’était pas viable et qu’elle a été rejetée par la population, qui est totalement affectée par la question palestinienne », déclare Amer Sebeileh, expert en géopolitique à Amman, cité par Reporterre.

« Israël et l’Amérique sont les vrais terroristes »

Dans les cortèges des manifestants jordaniens, dans lesquels figurent de nombreux palestiniens qui vivent en Jordanie depuis des décennies, les mots d’ordre se suivent et se ressemblent « Israël et l’Amérique sont les vrais terroristes », « Nous choisissons la résistance », « Cessez le génocide ». Les Jordaniens réclament également leur souveraineté fluviale et l’accès à l’eau. « Nous ne voulons pas l’eau d’Israël, nous ne voulons pas vivre dans la dépendance et l’humiliation », explique par exemple Amani Younes, une Jordano-Palestinienne de 38 ans.

 « Israël peut décider de nous couper l’eau comme à Gaza du jour au lendemain, et nous envoie parfois de l’eau contaminée qui nous fait tomber malade. Ne plus dépendre d’eux, c’est une question de survie », poursuit-elle révoltée.

En 1955, un accord régional prévoyait une répatition et un partage des eaux du Jourdain entre les différents pays de la région. La Jordanie devait recevoir 740 MCM et l’Etat hébreu, 400 MCM. Mais Israël a construit deux barrages sur le Jourdain en 1964 et en a détourné l’eau vers ses terres agricoles. La Syrie a construit elle aussi des barrages sur le fleuve Yarmouk en amont.

L’agriculture jordanienne en danger

Alimenté en eau par plusieurs rivières et le lac Tibériade, le Jourdain possédait un de 1,3 milliard de m³ dans les années 1930. Aujourd’hui, le débit du fleuve est à moins de 200 MCM (millions de mètres cubes), ce qui ne permet plus à la Jordanie d’irriguer son agriculture à cause des eaux polluées. L’accord de paix de 1994 prévoyait qu’Israël attribue 50 MCM par an d’eau propre à la Jordanie, « mais de facto, elle en reçoit la moitié », dénonce Myriam al-Jaajaa, présidente de l’ONG environnementale Arab Group for the Protection of Nature (APN).

« Et il ne respecte pas ses engagements de qualité, poursuit-elle : Beaucoup de Jordaniens sont tombés malades dans les années 1990 et 2000 car nous recevions de l’eau contaminée, avant de construire nos propres canaux. »

Plus de la moitié des ressources d’eau israéliennes proviennent de territoires colonisés, selon une étude. Les Palestiniens subissent une « occupation de l’eau », selon les termes d’Amnesty International.

Face à la double contestation du peuple jordanien, les autorités ont donc décidé de placer des tanks à la frontière. Amman ne souhait pas que les Israéliens repoussent les Palestiniens sur son territoire ni même que des Jordaniens franchissent la frontière pour combattre les soldats israéliens.

97 % de l’eau de Gaza est polluée

Actuellement, les transactions autour de l’eau passent par la société israélienne Mekorot, qui revend au prix fort 85 % des ressources en eau palestiniennes sous contrôle israélien. Les Israéliens bénéficient de 250 litres par jour par personne, et 300 pour les colons. Les Palestiniens de Cisjordanie n’ont que de 20 à 70 litres par jour.

À Gaza, 97 % de l’eau est polluée et non consommable à cause du siège imposé depuis des années par Israël, a constaté l’Organisation mondiale de la santé. Depuis le mois d’octobre, les Gazaouis qui ont moins de 3 litres par jour, « sont réduits à boire l’eau de pluie », avec tous les risques d’épidémies de maladies gastro-intestinales.

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