Ô Ibrahim, ton départ nous attriste

Anas, que Dieu l’agrée, rapporte : « Le Prophète entra chez Ibrahim [son fils] alors qu’il agonisait. Le Prophète, paix et salut sur lui, se mit à verser des larmes, Abd ar-Rahman ibn Awf lui dit aussitôt : « Toi aussi, Prophète de Dieu ? » « Ibn ‘Awf, cela est une miséricorde », répondit le Prophète. Puis il poursuivit : « Les yeux pleurent, le cœur est triste, mais nous ne disons que ce qui plaît à Dieu. Ô Ibrahim, ta séparation nous chagrine ! » (1)

La perte d’un être cher est sûrement un moment douloureux, d’autant plus si c’est un enfant en bas-âge qui n’a pas encore eu le temps de vivre sa vie. Un enfant dans lequel les parents ont parfois fondé un espoir, un enfant qui a été attendu, aimé, chéri. A plusieurs endroits dans le Coran, nous retrouvons cette requête, cette demande faite à Dieu d’avoir une descendance. Alors, oui, c’est un drame.

Dans le hadith, ce drame se déroule dans la maison prophétique, et les yeux de l’univers se tournent vers cette scène pour savoir comment il faut faire dans une telle situation, n’est-il pas celui qui a été envoyé pour nous guider ? N’est-il pas celui que le Coran nous incite à suivre « Vous avez dans le Messager de Dieu, un modèle à suivre » (2).

Dans le comportement du noble Messager, il y certes de la tristesse, qui se manifeste par ces larmes qui coulent le long de ses joues. Une miséricorde, c’est comme cela que les a désignés le Prophète, ces larmes.  A une époque où verser des larmes peut être perçu par certains comme un manque de « virilité », voici que le Messager par son modèle nous apprend complètement le contraire. Pleurer un être perdu, pleurer par crainte de Dieu, pleurer par amour pour son Seigneur, pleurer par amour pour un être cher, pleurer de chagrin, ces larmes ne sont plus une faiblesse, au contraire, ils sont la manifestation d’un cœur en éveil, d’une âme sensible, à l’écoute et en phase avec les éléments qui l’entourent. Un changement de paradigme, un enseignement prophétique par l’acte qui vient casser tous les totems traditionnels érigés en vérité absolue. Il est de notre devoir de changer nos repères en termes d’éducation et de nous orienter vers le modèle prophétique.

Après la tristesse, vient l’acceptation. Une acceptation mue par la confiance totale en la justice et la sagesse divine.  Nous lisons dans sourate la Caverne à des endroits différents les versets suivants : « Ils rencontrèrent un de Nos serviteurs qui avait été touché par Notre grâce et à qui Nous avions enseigné une science émanant de Notre part. Puis ils reprirent ensemble leur route et firent la rencontre d’un jeune homme que l’inconnu ne tarda pas à mettre à mort. «Quoi ?, s’indigna Moïse. N’as-tu pas tué là un être innocent qui, lui, n’a tué personne? Ne viens-tu pas de commettre une chose affreuse ? »… « Quant au jeune homme, il avait pour père et mère deux bons croyants. Nous eûmes peur qu’il ne les entraînât dans sa rébellion et son impiété, et nous voulûmes que leur Seigneur leur donnât à sa place un enfant plus vertueux et plus affectueux. » »

Qui sait où est le bien ? Peut-être que ce qui nous paraissait si bon ne l’était pas finalement !

Une dure épreuve qui vient voir à quel point nous avons confiance en Dieu et en Ses choix pour nous ?

Abou Sinan a raconté : « Après l’enterrement de mon fils, je demeurai un certain moment auprès de la tombe. Abou Talha Al-Khawlani me prit par la main pour m’éloigner de la tombe et dit  «Veux-tu que je t’annonce une bonne nouvelle ? » « Certes oui » répondis-je. Il répliqua: « L’Envoyé de Dieu, paix et salut sur lui, a dit : « Dieu demande à l’ange de la mort : As-tu recueilli l’âme du fils de Mon serviteur ? As-tu recueilli la joie de ses yeux et le fruit de son cœur ? Oui, répondit l’ange. Qu’a dit Mon serviteur, répliqua Dieu. Il T’a loué et dit : Nous sommes à Dieu et nous retournerons à Lui. Et Dieu de dire : Bâtissez pour Mon serviteur une demeure au Paradis et appelez-la « La demeure des louanges » »

Un enfant est mort ! La mort n’épargne personne. Elle fait fi de l’âge, de la couleur de la peau, de l’origine ethnique, de la situation sociale, etc.

La mort rappelle la question du sens de mon Existence : Pourquoi j’ai été créé ? Quelle est ma mission sur terre ? A quoi je sers ? Et surtout, la question cruciale, quel est mon devenir après ma mort ?

Des questions qui taraudent aujourd’hui l’humanité entière et nos concitoyens particulièrement, croyants ou non-croyants ! La question du sens de sa vie et de son devenir est une affaire qui transcende toutes les croyances.

Comment peut-on un instant imaginer vivre sans savoir « pourquoi on vit » ?

Si notre pays est le plus grand prescripteur d’antidépresseurs au monde, c’est que nous vivons un vrai malaise ! Un malaise profond que certains essayent de fuir via la prise de traitements, de drogues ou en s’alcoolisant, une fuite momentanée, puisque la question est toujours là au réveil : « Quel est le sens de mon existence ? »

Un silence assourdissant entoure cette question ! Le brouhaha de la vie de tous les jours étouffe toutes les voix qui tentent de nous rappeler cette question cruciale. Nous sommes trop occupés, notre leitmotiv c’est « je n’ai pas le temps ».

(1)Rapporté par Boukhari

(2)Coran : Les coalisés V-21

Un commentaire

  1. Salam
    Excellent ! Quelle jolie approche autour de cet évènement durant lequel le Prophète, paix sur lui, perdit son fils Ibrahim. Merci beaucoup pour cette jolie exhortation. C’est comme ci j’avais vécu ce moment aux cotés de notre bien aimé.

  2. Salam alikoum,
    Merci pour ce récit dont je n’avais jamais entendu parler…

    Que Dieu vous récompense et nous donne la sagesse.
    H.H.

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