« Donnez à la rue son droit »

Selon Abou Sa’id Al Khoudri, le Prophète, paix et salut sur lui, a dit : « Méfiez-vous de cette pratique qui consiste à vous asseoir dans les rues ! » Ils dirent : « Ô Messager de Dieu! Nous ne pouvonsnous en passer car c’est là pour nous l’occasion de parler entre nous ». Le Messager de Dieu leur dit alors : « Si vous tenez absolument à cette pratique, donnez au moins à la rue son droit ». Ils dirent : « Et quel est le droit de la rue ? Ô Messager de Dieu! » Il dit : « Abaisser son regard, s’abstenir de faire du tort, répondre au salut, ordonner le convenable et réprouver le blâmable. » (1)

Aujourd’hui, dans le contexte de nos sociétés occidentales et leur vision unifocale sur la communauté musulmane, il y a dans l’essence de ce hadith une vérité qui traverse les époques ; il nous faut repenser notre société et la manière dont nous voulons contribuer à cette dernière par le prisme de notre comportement et de son rayonnement sur nos entourages. 

La vie est un droit, le choix est un devoir.  Dieu nous a sommés, depuis la Révélation, de nous défier dans le bien, nous élever les uns les autres en Humanité pour espérer la rétribution finale « Si Dieu avait voulu, certes Il aurait fait de vous tous une seule communauté. Mais Il veut vous éprouver en ce qu’Il vous donne. Concurrencez donc dans les bonnes œuvres. C’est vers Dieu qu’est votre retour à tous; alors Il vous informera de ce en quoi vous divergiez » (2). Et la société aujourd’hui opère, en arrière-plan, un recul à ce niveau.  Les politiques et les médias se veulent contrôlants, par la peur, par le sensationnel, en jouant sur l’ignorance du citoyen lambda.  Nous finissons par nous tirer vers le bas plutôt que de nous élever.

Nous devons revoir la manière dont nous participons à l’évolution des mentalités. Aujourd’hui, nous subissons, nous regardons, pour beaucoup, au travers des lucarnes digitales, le monde s’écrouler, l’Humanité se perdre en conflits prétendument sociaux ou religieux qui, pour beaucoup, trouvent leur origine dans des intérêts géopolitiques ou économiques.  Mais nous sommes tellement « pris » dans l’étau du temps qui a été construit autour de nous, pour ne pas nous laisser le loisir de réfléchir posément, que nous perdons peu à peu notre esprit critique, notre œil intérieur, nous permettant de voir ce qui se passe réellement et participer au renouveau de notre société, des sociétés plurielles, où la liberté de penser, d’être, rencontre les fondements de cette laïcité dont tout le monde parle aujourd’hui à tort et à travers ; tant et plus que nous finissons par oublier la définition de celle-ci : une conception de la société visant une organisation où règne la neutralité des pouvoirs religieux par rapport aux politiques. Autrement dit, pas d’influence de la religion sur les affaires publiques. Tout en disant que cette définition (et les lois qui en ont découlé) faisait référence au danger du cléricalisme. Les conséquences de cette loi se voulaient claires : Liberté, octroyée par l’Etat, de croire, ne pas croire, de changer de religion « A vous votre religion, à moi ma religion » (3) et surtout pas de privilège dans l’une ou l’autre religion, pas de hiérarchisation de culte.

Que voyons-nous aujourd’hui ? Une société jouant sur les termes en en modifiant le sens et les définitions. La laïcité n’est plus synonyme de liberté mais d’interdiction, d’emprisonnement des sens et des consciences.

Face à cela, la population, dans son ensemble, doit faire front et la communauté musulmane, dans sa diversité, doit se libérer du carcan dans lequel elle s’enferme parfois elle-même ; celui de la justification.

Nous devons arrêter de constamment nous excuser de ce que nous sommes et le montrer. Nous devons arrêter de nous justifier de ce que nous ne sommes pas et agir, faire acte de présence de ce que nous sommes que ce soit dans le social, le politique ou l’économique.

Je suis un Musulman et fier de l’être.  Mais je ne peux répondre des actes d’un déséquilibré se pensant Musulman ou se revendiquant de ma religion.  Ni de mon frère égaré par un discours faussé, orienté et non-contextualisé.

Ô peuples du monde, regardez-moi, regardez-nous pour qui nous sommes, ce que nous sommes, comment nous nous comportons avec vous, entre nous, avec nos voisins, nos familles et nos concitoyens où que nous nous trouvions dans le monde. Ne vous arrêtez pas aux discours de haine et de communautarisme que nous entendons trop ces dernières années.

Ma compréhension du hadith, et ceci n’engage que moi, et Dieu seul sait, est la suivante : Nos paroles expriment qui nous sommes, nos actes détermineront la valeur de nos paroles. En tant que communauté du juste milieu, nous avons le devoir, l’appel de nous comporter de la meilleure manière qui soit.  Faisons taire les critiques non pas en répondant uniquement par nos langues mais laissons également et surtout parler nos actions.  Elles sont nos meilleurs atouts et serons nos témoins le jour du jugement.  Arrêtons de nous confiner dans nos demeures, montrons-nous, faisons tomber les masques que d’autres nous mettent.

Elevons le débat par une éthique à tous les niveaux.  L’islam est pluriel et présent partout dans le monde. C’est une force si nous arrivons à parler d’une voix dans le débat social et politique partout où nous sommes présents. Les Musulmans de 2017 sont de toutes les nationalités et ce, depuis plusieurs générations aujourd’hui. 

Notre Prophète Bien-aimé, Paix et la Bénédiction de Dieu sur lui, était et reste notre meilleur exemple, sa parole était douce et juste, ses actes réfléchis et droits, sa morale sans faille, son altruisme omniprésent et son humilité de tous les instants.

Et ce n’est qu’en agissant de cette manière, au vu et au su de tous, que nous serons fidèles à sa parole et respecterons les consignes de ce hadith.

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(1)     Rapporté par Bukhari et Muslim

(2)     Coran : Sourate 5, verset 48

(3)     Coran : Sourate 109, verset 6

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