Le libéralisme : Quelle limite ?

Dans cet article, Il est question d’approfondir le thème qui traite « du libéralisme et ses conséquences » en retraçant l’histoire de cette idéologie. Pour ce faire, je me suis inspiré du livre « La double pensée : Retour sur la question libérale » écrit par Jean-Claude Michéa[1].

Notre noble et bien-aimé Prophète, paix et bénédiction sur lui, disait : « Nul d’entre vous ne doit mourir sans avoir eu la bonne pensée »[2]. Car avoir la bonne pensée signifie avoir la certitude de sa croyance absolue en Dieu.

Au XVIIIe siècle, afin de tirer un trait définitif sur les guerres de religion, le libéralisme s’emploie à « pacifier » politiquement et idéologiquement la société. Comme Jean-Claude Michéa l’a exposé, « l’idée s’installe alors peu à peu que l’unique manière d’empêcher le retour des guerres civiles idéologiques est de s’en remettre à un Etat neutre, c’est-à-dire un Etat qui annule toute référence à des valeurs morales, religieuses ou philosophiques, et qui ne tienne par conséquent qu’un discours « d’ expert » »[3]

L’État, en d’autres termes, ne doit plus prétendre trancher entre les différents systèmes de valeurs auxquels les individus choisissent de se référer. Il ne doit plus dire que certaines façons de vivre valent mieux que d’autres, ni chercher à proposer, réaliser ou incarner un idéal philosophique ou religieux particulier. Cette attitude implique une stricte séparation de la sphère publique, ainsi « neutralisée », et de la sphère privée, où les valeurs peuvent continuer d’être vécues et partagées, mais à la condition de ne pas chercher à déborder dans la sphère publique. C’est le libéralisme politique.

Le libéralisme politique amenant logiquement au libéralisme culturel, puisque chacun doit être entièrement libre de choisir le mode d’existence qui lui convient. Il est clair que toutes les normes de vie héritées de la tradition et de la religion perdent immédiatement le pouvoir d’organiser le lien social. C’est ainsi, par exemple, « que tous les critères qui permettaient autrefois – au nom du simple bon sens – de distinguer un fou d’une personne saine d’esprit (du moins dans la plupart des cas), un enfant d’un adulte ou un homme d’une femme – sont perçus par les libéraux culturels comme autant de catégorisations arbitraires, oppressives et « discriminantes » qu’il s’agira, à ce titre, d’expulser définitivement de l’arsenal juridique existant »[4]

Or, le lien social, ou autrement dit la vie collective, est basé sur des valeurs et des normes. Le libéralisme culturel amènera donc à une société réduite à une simple addition d’individus sans lien social, ce qui ne peut aboutir, à terme, qu’à rendre toute vie commune impossible. Une société humaine n’existe, en effet, que dans la mesure où elle parvient à reproduire en permanence du lien, ce qui suppose qu’elle puisse prendre appui sur un minimum de langage commun entre tous ceux qui la composent. Or si ce langage commun doit, conformément aux exigences du dogme libéral, être neutre, il ne reste qu’une seule solution cohérente pour résoudre ce problème. Elle consiste à fonder la cohésion de la société sur l’unique attribut que les libéraux ont toujours tenu pour commun à l’ensemble des hommes : leur disposition « naturelle » à agir selon leur intérêt bien compris. Cette solution, c’est ce que Voltaire avait su formuler avec la plus grande clarté lorsqu’il écrivait que « dès qu’il s’agit d’argent, tout le monde est de la même religion ». C’est ce qui explique que l’échange marchand finisse toujours par apparaître, aux yeux des libéraux politiques, comme l’unique fondement possible d’une société qui, au départ, se proposait seulement de protéger les libertés individuelles et la paix civile. Seul l’univers du marché, autrement dit le libéralisme économique, est effectivement susceptible d’offrir aux individus, isolés les uns des autres par le libéralisme culturel, ce langage commun minimal.

Le problème aurait été toutefois le même si on avait choisi de partir des principes du libéralisme économique. Une économie de marché ne peut, en effet, se développer de manière durable que si la plupart des individus ont intériorisé une culture de la mode, du spectacle et de la consommation illimitée, culture fondée, par définition, sur la célébration perpétuelle du caprice individuel et du plaisir immédiat encouragé par le libéralisme culturel.

En résumé, le libéralisme culturel et le libéralisme économique sont les deux faces d’une même médaille, un système qui n’accepte plus de limites qu’elles soient morales, philosophiques ou religieuses. Et c’est ce système, nous disent les libéraux, qui nous amènera à une société pacifiée. C’est ce qu’Emmanuel Kant écrit dans son «Projet de paix perpétuelle» : dans l’hypothèse d’un travail législatif parfait, la seule mécanique du Droit (qui ne se base sur aucune morale ou religion) suffirait à assurer la coexistence pacifique même d’un peuple de démons.[5]

C’est ici que les ennuis du libéralisme politique commencent. Aucun des premiers libéraux n’aurait célébré, par le libéralisme, l’avènement d’un « peuple de démons » ; le problème c’est que rien, dans la logique du libéralisme politique, ne protège ce dernier contre une telle éventualité. Le droit libéral ne se réfère pour l’exercice de la liberté qu’à la seule nécessité de ne pas nuire à autrui. Selon ce critère, de quel droit, la société libérale pourrait-elle empêcher un individu de se nuire à lui-même (par la drogue ou autre…) ? Si l’on fonde son jugement sans recours à la moindre valeur ou éthique, de quel droit critiquer la marchandisation du corps (prostitution, GPA – gestation pour autrui…)?

La « neutralité » libérale, avec une vie commune basée sur l’échange marchand, touche ici son ultime limite. Le bien, dans la société libérale, c’est le règne de l’argent avec tous les excès que cela implique. Une société où l’individu est fondamentalement égoïste, cherchant en permanence à calculer de façon rationnelle son meilleur intérêt matériel.

L’islam avec ses valeurs et sa tradition gène la logique libérale, parce qu’elle propose de remettre de la morale là où elle a disparu ; permettant à l’Homme de résister à la course folle du marché, à l’éclatement mondialisé des sociétés et à la transformation des hommes en consommateurs compulsifs.

 


[1] Prônant des valeurs morales proches du socialisme de George Orwell, Jean-Claude Michéa fustige l’intelligentsia de gauche qui s’est selon lui éloignée du monde prolétarien et populaire2. Il défend des valeurs morales collectives dans une société de plus en plus individualiste et libérale, faisant exclusivement appel au droit et à l’économie pour se justifier. Il « considère que les idéaux bourgeois libéraux ont triomphé du socialisme en le phagocytant » et « déplore que le socialisme ait accepté les thèses du libéralisme politique3 ».

[2] Hadith rapporté par Muslim, Abu Dawud, Ibn Majah

[3] L’empire du moindre mal : Essai sur la civilisation libérale [Broché]

[4] http://ragemag.fr/liberalisme-de-gauche-et-liberalisme-de-droite-par-jean-claude-michea-20379/

[5] Projet de paix perpétuelle de Kant, texte intégral : http://books.google.fr/books?id=XR5-sgbKGQcC&pg=PA36&lpg=PA36&dq=Projet+de+paix+perp%C3%A9tuelle,+d%C3%A9mons&source=bl&ots=NW23tFdqgM&sig=OvVLfIh6fmTRHR_mbwhDmPZVktc&hl=fr&sa=X&ei=9cIyU_boMMTS0QWj44DYCQ&ved=0CDEQ6AEwAA#v=onepage&q=Projet%20de%20paix%20perp%C3%A9tuelle%2C%20d%C3%A9mons&f=false

 

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